Il y a à Montréal des endroits déconcertants, qu’on découvre lorsqu’on s’écarte des routes habituelles… Des endroits qui font un peu penser au Chemin de Traverse et qui mènent à des lieux hors de la ville, même lorsqu’on reste en son centre. Un de ces endroits baignés de mystères est le Jardin du Crépuscule, une petite friche industrielle, au confluent du viaduc Van Horne et de la rue Saint-Urbain. Parsemé d’œuvres d’art constituées de pièces de métal recyclées, ce jardin de sculptures en plein air est quadrillé de sentiers laissés par les passants qui s’y aventurent. Car une fois qu’on a mis le pied sur le terrain, on ne peut faire autrement que de s’y plonger, intrigué par l’aura qui se dégage de l’endroit, transporté dans un monde parallèle, à la fois poétique et brut.

Ce dépaysement, on le doit à l’artiste Glen LeMesurier. J’avais découvert l’existence illégale, mais tolérée, de son jardin dans Le Devoir, en 2007. Puis sur place. J’y suis retourné la semaine dernière pour constater que le Jardin du Crépuscule, même sans affiche officielle de la Ville, est devenu, avec les années, un lieu de rassemblement pour les gens du quartier. On y passe, on y flâne, on s’y assoit et on s’y égare du monde qui nous entoure, fasciné.

Jardin du Crépuscule

Il faut dire que depuis 2007, Glen LeMesurier a fait l’objet d’une exposition à la Maison de la culture Côte-des-Neiges (en 2010), d’une présentation sur le Cours Le Royer dans le Vieux-Montréal (en 2012) et qu’une vingtaine de ses sculptures agrémentent le Parc des Faubourg (coin Ontario et de Lorimier) depuis le début de l’année. Cette dernière exposition, « Métal à Ciel Ouvert », mérite elle aussi le détour. La présentation y est soignée, rangée, ce qui contraste avec  l’ambiance de mystère qui entoure le Jardin du Crépuscule.

Revenons donc au Jardin, qui profite depuis peu d’un voisinage qui contribue à son attractivité. En effet, lors d’un événement qui s’est déroulé cet été, les poutres soutenant le viaduc Van Horne, à l’Ouest de Saint-Laurent, ont été recouvertes de murales, tout comme l’avaient été celles de l’Est de Saint-Laurent en 2010, créant du coup une promenade tout à fait étonnante, à deux pas du Jardin du Crépuscule. L’ancien « no man’s land » sous le viaduc est ainsi devenu un endroit plein de couleurs! Il n’y manque qu’un petit aménagement paysagé et on pourrait même parler de nouvelle place publique invitante…

Sous le viaduc Van Horne 1           Sous le viaduc Van Horne 2

Ce qui est bien, c’est que cette galerie à ciel ouvert, qui débute avec les sculptures de Glen LeMesurier au Jardin du Crépuscule et qui se poursuit avec la quinzaine de murales sous le viaduc, mène directement au Champs des Possibles, un espace naturel maintenant reconnu par l’arrondissement et protégé. Le premier « parc sauvage » de Montréal! On s’y retrouve en plein champs, entouré de bâtiments industriels… Mais pas n’importe quel champ : un oasis d’une biodiversité impressionnante. Un autre lieu où s’évader de la ville, en pleine ville!

Champs des Possibles

Ainsi, c’est tout un parcours, tout un Chemin de Traverse que nous proposent ces trois endroits magiques. Ils sont au cœur de la cité, sans y être vraiment tant leur différence est marquante. Raccourcis vers la nature, raccourcis vers la culture, raccourcis vers les mystères d’une ville à dimension humaine.

En complément de ce texte, vous allez aimer Des animaux sauvages à Montréal, qui parle de l’écologie de la réconciliation et Les lignes de désir du CP, qui évoque le potentiel naturel et social de la voie ferrée qui longe le Jardin du Crépuscule, passe sous le viaduc et borde le Champs des Possibles.